Quand le scénario touche sa fin

Comment créer des règles d’interaction avec les clients, en sept étapes

Malgré le libre-service et les chats bots, les appels en direct avec les agents de centres d’appel existent toujours.   Des sociétés spécialisées vendent des solutions toutes faites à l’emploi pour la téléphonie, les scénarios d’appel, les mesures de contrôle, le recrutement et la formation des employés – le tout « clé en main ». Mais les consommateurs en ont assez des voix amicales qui lisent les scénarios. Les agents éprouvent de plus en plus de difficultés à garder l’attention de leurs clients. Les dirigeants se demandent comment motiver les agents. Les départements commerciaux et de back-office qui créent des produits ou qui respectent consciencieusement leur ensemble de niveau de service (SLA, Service Level Agreements) disent que les troupes en première ligne ne savent plus parler.

Je conseils de créer des « normes de communication avec les clients » dédiées pour les centres d’appels. Dans cet article, je partage mon approche par étape, qui n’a rien à voir avec la technologie mais plutôt se concentre sur la communication et le contact humain.  L’article s’adresse aux chefs d’entreprise et aux chefs de projet.

1. Commencez par les valeurs de l’entreprise

Les normes applicables à la relation client découlent au fond de la mission d’une entreprise, de ses valeurs et de sa promesse au client. Les clients ne bénéficient pas tous toujours d’un service de la plus haute qualité. L’une des raisons peut-elle être liée à la façon dont notre monde est divisé par les inégalités et les visions du monde ? Dans mon pays, la Russie, par exemple, même les médias officiels et les campagnes publicitaires font pratiquement la promotion de l’intolérance.  Par conséquent, au bureau, les chefs d’entreprise ne peuvent pas s’attendre à ce que tous les employés traitent les autres d’une façon voulue. Pourtant, les valeurs humaines fondamentales ne peuvent pas être ignorées. Les principes suivants doivent être adaptés à la réalité de votre entreprise: – chaque employé et chaque client est respecté,

– l’entreprise s’engage à fournir des produits de qualité et un bon service aux clients,

– l’entreprise promet de bonnes conditions de travail à ses employés,

– l’entreprise recueille les réactions des clients et des employés et y donne suite.

2. D’abord les principes éthiques, puis des règlements techniques

Les règles ne sont pas des « coups de cœur ». Vos agents peuvent se voir comme des patriotes et des personnes cultivées, et en même temps ne pas remarquer leurs propres manifestations de racisme, de nationalisme et d’autres « -ismes ». La direction de l’entreprise doit déclarer : dans ses pensées, un employé peut maudire 24 heures sur 24 les riches, les débiteurs, les migrants, les méchantes grand-mères capricieuses ou les minorités sexuelles mais sur le lieu de travail, il doit suivre les règles : parler à chaque personne poliment et lui montrer du respect.

Les attitudes éthiques doivent constituer le cadre des exigences techniques.

3. En vous basant sur des valeurs, fixez vos objectifs: vous avez besoin de nouvelles règles – pourquoi ?

Les agents d’un grand centre de télémarketing, ayant assez que les clients ne voulaient pas les écouter, les superviseurs ont voulu les aider à changer le style de leurs conversations. Après avoir écouté plusieurs enregistrements avec les agents, l’équipe du projet a conclu qu’un discours trop rapide des ceux-ci sans pause (« temps de traitement moyen » !) et l’absence de leur réaction immédiate aux répliques, critiques ou blagues, donnaient aux clients l’impression de parler à des automates.

En définissant les objectifs, l’équipe de projet a invité les employés à la discussion, et des objectifs tels que « être admirées par les clients », « savoir mieux expliquer l’essence du produit », « augmenter le prestige du travail de l’agent » ont été proposés et acceptés avec enthousiasme.

4. Analysez les réactions et identifiez les détails qui dérangent les clients

Vous êtes en ligne avec une banque ou un centre de services, et vous entendez des conversations ou le son d’un jeu vidéo.  Ou bien l’agents répète votre nom au début de chaque phrase, on lui a probablement dit que ce serait poli, mais il s’avère au contraire que c’est grossier. Ou bien le client a dit que pour lui, ce n’est pas un bon moment de parler, l’agent l’assure que la conversation va durer trente secondes, et de bavarder pendant cinq minutes. Ou bien le « sourire dans la voix » est si artificiel qu’il semble                hors norme, et mal à propos. Doutez-vous qu’il soit nécessaire de chercher des médicaments contre ces choses? A n’en pas douter.

5. Plongez-vous dans la matière, convainquez les principaux responsables de s’y joindre

Il est utile de recueillir l’avis des agents sur ce qui réjouit les clients et ce qui les contrarie, mais il est tout aussi utile de recueillir soi-même des informations, et d’entendre en direct la voix du client en même temps que l’agent en prenant nécessairement des notes (sinon il n’y aura qu’une impression générale, sans exemples précis). Pour que les agents ne soient pas effrayés sans raison, ils doivent vous considérer comme un collègue de projet qui collecte du matériel, et non comme un superviseur qui leur infligera une amende pour avoir commis une erreur.

« Tout en haut », vous pouvez vous heurter à un étonnement – n’avons-nous pas d’autres problèmes que la façon dont les agents choisissent les mots et changent leur intonation ?  Peu importe le statut du patron à qui vous parlez, fiez-vous au matériel. Citez les commentaires critiques, allumez les enregistrements. Il est préférable que les chefs d’entreprise passent au moins une demi-heure dans un environnement réel, à côté des agents, pour écouter les conversations.

6. Rédigez le texte des règles

Après s’être plongé dans le matériel, fournissez à l’équipe du projet une liste des points douloureux et des solutions qui s’adresseront aux sujets qui fâchent – ils constitueront la base du livre des règles. Transmettez la liste des améliorations nécessaires des processus et des technologies aux autres équipes. Prenez par exemple le commentaire suivant : « Un jeune homme me répond d’une telle voix comme s’il était assis dans un fauteuil, les pieds sur la table, et moi, je le dérange… ».  Transformez l’impression du client de cette sorte: « Notre respect pour notre interlocuteur se manifeste également par la façon dont nous sommes assis à notre bureau. Une bonne posture est bonne pour le système respiratoire, et la voix sonne mieux. Pour garder vos forces, faites une pause toutes les 45 minutes, bougez.

Demandez aux agents de faire des suggestions tant sur la forme que sur la forme.  Discutez de chaque règle, essayez de l’appliquer à l’analyse d’appels spécifiques, pour rendre la formulation claire. Faites une collecte privée d’opinions.  Les employés qui ont contribué eux-mêmes à l’élaboration des règles seront heureux de les utiliser.

7. Réfléchissez à ce que l’entreprise offrira à ses employés en échange de nouvelles demandes.

Souvent, la conversation sur « ce qui est bon et ce qui est mauvais » conduit à la discussion d’un large éventail de questions : conditions de travail des agents, exhaustivité et actualité des informations qui leur parviennent, interaction entre les services et la culture d’entreprise. Si les agents disent que ‘la production’ qu’ils sont censés vendre n’a aucune valeur pour le consommateur – allez voir les producteurs pour comprendre si les avantages du produit ne sont pas appréciés, ou ils n’existent pas vraiment ? Retournez au front avec quelque réponse à la question posée.

En proposant de nouvelles exigences et de nouvelles normes, il est nécessaire de satisfaire les employés en leur offrant quelque chose en même temps.  L’entreprise veut obtenir quelque chose d’eux – alors vous devez donner quelque chose en retour. Par exemple : dans le centre d’appel, où le projet d’introduction de nouvelles normes d’interaction avec les clients était en cours, un code vestimentaire strict a été adopté, ce qui pèse sur les employés. L’équipe du projet a convaincu la direction de changer la consigne, a proposé une version allégée du code vestimentaire, a organisé plusieurs présentations amusantes « vêtements сonvenables – vêtements pas convenables ». Les opérateurs ont noté qu’ils « respiraient mieux », les nouvelles règles ont été acceptées dans le cadre du changement pour le mieux. Menez une enquête auprès du personnel pour voir si tout va bien. S’il s’agit d’un bureau – y a-t-il assez d’eau potable ? d’air frais ? y a-t-il un endroit pour s’asseoir en silence complet pendant une pause ? Si l’agent travaille à domicile – que peut améliorer l’employeur pour lui ?

Lorsque des normes sont créées, les critères de leur mise en œuvre sont spécifiés dans les procédures et les listes des vérifications de l’équipe de contrôle qualité уе des affiches lumineuses sont produites, il est important de ne pas s’arrêter.  Afin d’éviter que les « mémoires » ne deviennent les souvenirs d’un projet intéressant, les normes doivent faire l’objet d’une discussion plus approfondie en fonction des nouvelles situations. Les superviseurs peuvent organiser des journées thématiques, des concours de campagne, des « cinq minutes » pour lire les réactions de reconnaissance (motivation – le thème d’un autre article).

En guise de conclusion je dirai deux mots sur les erreurs dites critiques, qui concernent (a) des informations sciemment fausses, (b) des écarts par rapport aux règles de base des appels, (c) le fait pour l’agent d’omettre des avertissements légalement requis et nécessaires. Ces erreurs sont commises soit par de nouveaux employés pour qui les bonnes habitudes d’interaction avec les clients ne sont pas encore internalisées et automatiques, soit par des employés fatigués, « épuisés » et prêts à démissionner.  Mon expérience montre que lorsqu’un code d’interaction avec les clients est créé, raisonnable et évolutif en réponse aux demandes des clients, tant le nombre d’erreurs critiques que la rotation du personnel diminuent.

 

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