Le rêve de Casablanca et les « Dix Commandements de l’Emprunteur »

L’année 2019 m’a donné une opportunité de travailler au Maroc. Le dernier voyage avait eu lieu en décembre qui à Casablanca est comme mai à Moscou.

Le Maroc ne peut être attribué sans équivoque au monde arabe, c’est un pays multiculturel, mais on n’y trouve pas facilement des terrasses ouvertes européennes.  C’est qu’on va manger et parler plutôt caché derrière des murs et des rideaux.

Souvent un luxe brillant se révèle derrière une façade assez minable. Il y a beaucoup de poussière dehors, on creuse et fore, « en maîtrisant les moyens » peut être. À Moscou, la mêmes chose se passent déjà depuis quelques années au début de l’été.

Un luxe brillant, c’est Dar Dada, un restaurant marocain à Médina, grand, lumineux et bruyant avec tapis et dorures, arcs et galeries, et une saveur de miel et de fruits dans une variété de plats, même par définition non sucrés.  Les serveurs de haute taille  nous sourient chaleureusement en répétant  « oui, madame, bien sûr madame », et sourient demi-heure après lorsque on lorsqu’on leur fait rappeler la demande…

Mes collègues et moi, on a convenu que le lendemain, en dehors de mon programme de travail, je reviendrais à Medina avec les managers de la banque partenaire, pour visiter le Centre de Renforcement des Compétence Féminines.

Meryem et Maria ont été mes guides.

Le Centre est dirigé par Sabah Chraibi, juriste, professeure universitaire, fondatrice et président de l’association nationale ESPOD (Espace Point de Départ). Sabah est impliqué dans le droit des genres depuis les années 1980. Au début des années 1990, elle a travaillé pour une commission chargée de rédiger le nouveau code de la famille du pays et a été convaincue par des recherches approfondies que l’autonomie économique des femmes offre d’importantes possibilités aux femmes, à la famille et au pays. Les cours dispensés au centre de formation dirigé par Sabah permettent d’acquérir des compétences professionnelles utiles dans

la vie de tous les jours : cuisine, coupe et couture.  Sabah souligne que malheureusement le système éducatif existant dans le pays prépare plutôt des « salariés », des travailleurs embauchés, et que l’accent n’est pas suffisamment mis sur les connaissances qui permettent d’atteindre l’indépendance économique par l’esprit d’entreprise.

Parmi les participants d’ESPOD, on trouve à la fois de grandes cheffes d’entreprise et des juristes, et la tâche de cette association de femmes est d’aider d’autres femmes à créer une entreprise et à trouver un soutien pour elles-mêmes.

Pendant que les élèves sont en classe, leurs enfants sont gardés ici même  au Centre avec des profs. C’est bien de voir à peu près le même nombre de garçons et de filles dans la classe. Ces enfants connaissent Masha des dessins animés « Masha et l’ours » ! « Tu vois ? » – Meryem rit – « Nous l’aimons, votre Masha. »

Quand verrez-vous un café, un atelier ou une boutique devant chaque fenêtre de Médina ?  Le désir de créer une entreprise en utilisant les compétences acquises au Centre ne suffit pas, il faut des crédits de démarrage et la possibilité de louer de petits locaux à un prix abordable.  En ce qui concerne les crédits, le marché marocain offre d’excellentes opportunités.

Le roi Mohammed VI a lancé un programme de soutien aux jeunes et nouveaux entrepreneurs, et les entreprises qui travaillent depuis moins de cinq ans peuvent obtenir un prêt à 2 % par an. Avec la mise en quarantaine de COVID-19 et la fermeture de nombreuses entreprises, les banques ont pu émettre des prêts de soutien sous  garanties d’une fond gouvernemental.  L’affaire avance-t-elle ?

Ce serai magnifique que il y ait un département spécial… C’est ce dont nous avons parlé avec Meryem et Maria sur le chemin du retour.  Et, j’ajouterais, qu’en plus de la volonté de la direction et des méthodes spéciales, il faut que il soit une équipe de passionnés qui non seulement travaillent avec des chiffres, mais aussi ont rendez-vous avec les emprunteurs, observent les entreprises et touchent tout à la main.

Il faut devenir « banquiers sans cravate » et aller chercher des emprunteurs, sans attendre qu’ils viennent eux-mêmes à la banque. Et pour les experts en crédit débutants, on peut conseiller de suivre ces conseils –

Ce sont les dix commandements du prêteur…

1) la demande de crédit n’est pas seulement votre responsabilité, c’est votre opportunité,

2) ne vous faites pas de jugement définitif avant de rencontrer le client et, lors de la rencontre, écoutez attentivement,

3) si vous ne comprenez pas les choses dont le client parle, ne prétendez pas comprendre, posez des questions,

4) demandez des détails, mais veillez à ce que ceux-ci ne masquent pas le projet même,

5) ce n’est le gage mais l’activité de client qui est primordiale, mais si le gage est offert, il ne faut pas évaluer sa qualité telle quelle, mais sa liquidité,

6) faire des promesses au client, prenez des obligations seulement après avoir recueilli tous les faits nécessaires pour présenter la future transaction à la banque,

7) faites votre propre opinion argumentée, ne transférez pas ce travail à la « banque », au « comité de crédit »,

8) si, après analyse des faits, vous arrivez à la conclusion que la demande doit être rejetée, dites-le directement, expliquez les raisons,

9) si vous disposez de tous les faits, de tous les aspects de la future transaction que vous avez évalués – prenez votre propre décision et assumez la responsabilité de celle-ci,

10) si l’analyse et la réflexion vous ont conduit à la réponse positive, alors dites « oui » à ce crédit!

Bonne chance pour prêter aux collègues marocains qui rêvent, comme moi, d’une nouvelle Médina, avec des façades élégantes et des cafés ouverts.

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