Nadia est venue à la succursale de la Sberbank où j’étais commissaire du programme de soutien aux petites entreprises de la BERD en Russie en juin 1998. Elle m’a parlé de son entreprise : deux diplômées de l’Institut Textile font des chapeaux et des casquettes pour femmes, la co-fondatrice, Elena, est chargée du design, Nadia de la production et de vente; de cinq à dix employées selon la saison, on loue un local. En été, les ventes sont basses et on a besoin d’argent, il faut acheter des matières premières pour la saison suivante. La source de financement habituelle sont des prêts privés, accordés par des amis. À l’époque, il y en avait deux : un de 3 000 dollars, à 36% par an, l’autre de 2 000 dollars, à 66% par an. L’intérêt semble terrifiant, mais l’inflation était également élevée et le gouvernement a soutenu le rouble artificiellement. Le nouveau système bancaire a été formé sur la base de l’ancien, planifié. Les normes internationales de prêt ont été une innovation, mais elles étaient faciles à adopter. Le simple bon sens était évident pour la plupart du personnel bancaire au cœur de l’approche que nous, les consultants du Fonds de soutien aux petites entreprises de la BERD, également mettions en œuvre.
La chance
La companie « Syrinx » a obtenu le prêt de la BERD, 30000 roubles = 5 000 dollars, pour 2 ans, à 36% par an. L’intérêt était comme d’un prêt privé, mais il s’est trouvé à la fois moins cher et plus pratique. Le calendrier de paiement était pratique : il fallait payer chaque mois petit à petit, au lieu de reporter de peur de ne pas obtenir le montant requis à la date prévue. Avec de l’argent du crédit on a acheté des matières premières, des tissus et des équipements supplémentaires – un fer à repasser professionnel.
Et la principale chance a été que les roubles ont été dépensés avant le 17 août, car après que le gouvernement ait annoncé la défaillance, les marchandises ont commencé à disparaître, et puis, le rouble a chuté par rapport au dollar. Toutes les importations devaient être payées 2, puis 3 et 4 fois plus.
2020
Aujourd’hui, l’entreprise dispose de deux sites de production, de plusieurs dizaines d’employés, de plusieurs milliers de modèles de coiffes pour différentes saisons. Plus des vêtements. Une gamme de produits constamment mise à jour et un commerce en expansion via Internet.
La crise comme une chance
Nina : Et comment avez-vous survécu d’autres crises depuis 1998 ?
Nadia: La crise est une occasion de regarder les choses familières d’une nouvelle manière. Début 2014, en raison des événements survenus en Crimée et en Ukraine, le rouble a de nouveau chuté, la monnaie a commencé à coûter deux fois plus cher. Les ventes se sont figées.
Soudain, nous avons eu du temps libre. Nous nous en sommes servis pour affiner nos produits, pour développer de nouveaux modèles exclusifs, pour en essayer de nouveaux.
Au printemps 2014, rien n’a été reçu des grossistes qui paient généralement à l’avance les futures commandes d’automne. Par contre, un client dont on avait été mécontent, nous a réjoui. Le magasin Metro réglait ces contes pour les marchandises réalisées avec un grand délai mais sûrement. En 2012 il y avait eu une crise, et nous avions maîtrisé le service bancaire « factoring » : les clients vous doivent de l’argent pour les produits expédiés -> on montre à la banque les contrats et les bordereaux d’expédition -> la banque prête 60-70% du montant des créances comme crédit pour une courte période. On modifie les contrats avec les clients de manière que le paiement soit effectué sur le compte de la banque qui fournit le factoring.
Fonds de soutien aux petites entreprises russes de la BERD
Nina : Quels sont les souvenirs de la collaboration avec les prêts de la BERD ? On nous a toujours reproché de poser trop de questions aux emprunteurs potentiels.
Nadia : J’avais l’impression que les organisations internationales veulent comprendre ce qui se passe en Russie. Combien d’ombres y a-t-il dans l’économie et si les entreprises veulent en sortir, par exemple. Lorsque je travaillais avec vous, j’ai eu le sentiment qu’ils voulaient obtenir le plus d’informations possible de ma part, et pour cela j’ai obtenu un prêt. Les conditions relatives aux intérêts et au calendrier de remboursement étaient intéressantes, et je ne voyais aucun risque à partager des informations sur l’entreprise. La coopération avec la banque m’a permis d’acquérir une expérience inestimable. Nous autres, les gens créatifs, ne comprenions ce qu’est la profitabilité. Le programme de la BERD, vos questions, vos demandes m’ont appris à compter et à mieux comprendre mon propre business.
Compétition
Nina : Il semble parfois que tous les fabricants ont le même concurrent – la Chine. Est-ce bien le cas ?
Nadia: Les produits chinois n’ont ni âme ni originalité. Nous avons des éléments de très haute qualité, faits à la main. Les petites gammes ont toujours plus de valeur que des millions. On copie nos chapeaux et casquettes – en Belarus, en Ukraine et en Chine. Mais quand on ne fait que « prendre l’original – le couper – le recopier », la qualité et le caractère unique sont perdus. Je ne pense pas à ce piratage. C’est dommage, mais que faire ? Alors, on invente quelques choses de nouveau.
A part ça, les Chinois accordent un prix plus élevé aux nouveaux clients, c’est-à-dire qu’ils sont constamment à la recherche de clients qui paieront plus cher. D’un côté, Ils ont raison. Je veux dire que la Chine n’est pas nécessairement toujours moins chère. Mais il s’avère qu’il n’est pas rentable pour nous d’acheter certains composants pour nos produits en Chine, on peut en trouver moins cher en Russie.
Nina : Vous avez tant de modèles ! Plusieurs centaines ?
Nadia : Quelques milliers. Nous travaillons depuis tant d’années. Si un modèle n’a pas été produit pendant dix ans, on peut le relancer sans problême.
Difficultés
Nina : Qui travaille pour vous ?
Nadia : Il n’y a pas de véritables spécialistes des couvre-chefs en Russie à l’heure actuelle.
On embauche un apprenti, on lui apprend le métier, on tient beaucoup à lui.
Nous refusons aux non- Moscovites qui vont partir dans un an.
Nina : Pouvez-vous dire qu’il s’agit d’une « entreprise féminine » ?
Nadia : Les femmes sont plus sensible à la particularité de notre production. Nous embauchons des hommes mais ils travaillent dans la logistique et dans les ventes.
Nina : Est-ce plus difficile ou plus facile pour les femmes de réussir dans le monde de business que pour les hommes ?
Nadia: Lorsqu’il s’agit de résoudre une question difficile, j’agis sans faire semblant d’être un homme. Je peux raconter une histoire. Nous faisions des réparations dans une pièce semi-souterraine où nous avons maintenant un atelier de couture, et nous avions un policier de district qui était très désireux d’obtenir de l’argent, et nous avons fait semblant de ne pas comprendre. Il est venu chez les ouvriers ouzbeks, certains d’entre eux devaient travailler illégalement, je n’étais pas au courant, nous avons seulement parlé au contremaître. Le policier leur a pris de l’argent. C’était en 2003. Il était moins cher pour une entreprise de construction de donner un pot-de-vin que d’officialiser les travailleurs. Puis il est venu nous demander de l’argent, à nous aussi. Le lendemain, je suis allé au bureau du chef de la police du district pour un rendez-vous. Je me suis mis à parler et à pleurer. Il a appelé notre officier de police, et tout s’est arrangé. Il a cessé de venir nous voir. Et puis ce nouveau chef de district a été licencié, et notre officier de police est revenu.
Il cherchait des irrégularités dans la salle, dans l’organisation du travail. Mais il n’a rien trouvé. Et puis il a réalisé que c’était inutile. Et un bon jour, il est venu pour nous demander de raccourcir les nouveaux pantalons d’uniforme. Nous l’avons fait, puis nous sommes devenus amis.
Succès
Nina : Qu’est-ce que le succès pour tois ?
Nadia : J’aime apprendre que nos produits sont portés avec plaisir, qu’on commande nos produits de telle sorte que les employés se soucient de savoir s’il y en aura assez pour tous les clients. J’imprime certains des commentaires que je reçois de mes clients et je les mets sur les murs de bureau pour que tout le monde puisse les voir.
Je vois maintenant une opportunité de nouveaux succès – restructuration des ventes, renforcement du commerce électronique. Le monde est si grand, et tout le monde ne porte pas encore des chapeaux et des casquettes.
Avis de clients :
Nous tenons à remercier le fabricant pour la qualité de son pull et de ses tuniques ! J’en ai acheté de presque toutes les couleurs, super ! Bravo ! Maintenant que je suis un de vos fans, je vais suivre les nouveaux produits. Merci !
C’est un beau modèle. Il est agréable et confortable à porter. Il semble que les chapeaux, les casquettes et autres produits de Sirynx seront bientôt une marque préférée. Allez-y !